09/11/2014

Samedi-sciences (1) : boucher un trou noir


Ce matin au marché un attroupement s'était formé autour du vendeur de salades qui ne s'en laisse pourtant pas compter mais qui parlait le verbe haut tout en faisant des moulinets avec les bras, caractéristique principale comme chacun sait du signe de l'inquiétude chez les hominidés vertébrés.

Je faisais prudemment la queue avec mon cabas à l'étalage d'à côté pour essayer d'entendre de quoi il en retournait et accessoirement acheter des croquettes pour le chien.


Il était question d'un énorme trou noir (1) qu'on aurait découvert et de la fin du monde prévue pour le 21 décembre prochain ...

Mon sang se glaça et se figea. Le sang froid ainsi gagné, je devais absolument le garder en l'état pour courir avertir Léon qu'il n'était plus nécessaire de continuer à décorer le sapin en plastique avec les boules de Noël.

En rentrant, un rapide coup d'oeil dans la cuisine me fit comprendre que Léon était sorti au PMU avec le chien et qu'il me restait donc un peu de temps pour en avoir le coeur net.

"Nous avons découvert récemment que nous avons nous-même un trou noir. Notre trou noir est très tranquille. C'est un trou noir rassis ... il bouge pas beaucoup. On s'est demandé pourquoi il y en a qui sont actifs et d'autres sont tranquilles. La réponse : le trou noir c'est un ogre et un ogre à besoin de manger (...)

Même s'il y a un trou noir géant dans notre galaxie il ne faut pas paniquer. Après tout ces ogres cosmiques ne dévorent que ce qu'il y a à portée immédiate. Nous ne risquons absolument rien."


J'écoutais religieusement Monsieur Reeves. Hubert me plaisait depuis toujours. Il savait tellement bien parler des étoiles ... il m'avait si souvent réconfortée à la télévision ... le bruit sec du claquement de la porte du garage me sorti brusquement de ma torpeur.

Et si Hubert m'avait mentie. S'il s'était trompée dans ses calculs. Avec mon convertisseur en euros, je n'aurai jamais le temps de vérifier la distance de ce gros trou noir en années lumières.

Il fallait trouver une solution pour sauver la galaxie.

C'est précisément au moment où je composais le numéro de téléphone de Madame Bond tout en pianotant nerveusement sur le clavier de l'ordinateur que j'entrevis le seul dénouement possible pour éviter la catastrophe : une baudruche géante pour obstruer les tunnels du métro !



Il ne me restait plus qu'à prendre les mensurations du trou noir ce qui, pour une couturière, est ma foi un jeu d'enfant.



Quand Léon arriva avec le chien, je souriais paisiblement dans mon coin. J'avais oublié d'acheter les croquettes mais l'humanité pourrait se baffrer tranquillement pendant les fêtes de fin d'année. La fin du monde était repoussée aux calanques grecques (*)


Paulette



* (NDRL : près de Cassis).

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